Gean G.
« Je me suis retrouvé·e avec un paquet de boutons sur les deux mains »
Quand j’ai entendu parler de la propagation de la mpox au sein de la communauté 2S/LGBTQ+, c’était par des ami·e·s préoccupé·e·s que je puisse la contracter. Je suis une personne queer active sexuellement, c’est-à-dire que je me rends au sauna à Montréal une à deux fois par mois et l’été je drague dans les parcs deux à trois fois par semaine. Quelques un·e·s de mes ami·e·s sont des médecins et des infirmier·ière·s qui travaillent dans des cliniques 2S/LGBTQ+. Iels m’ont conseillé d’arrêter d’avoir des relations sexuelles jusqu’à ce que le vaccin antivariolique soit disponible à Montréal.
![](https://mpox.ca/wp-content/uploads/2022/10/Photo-Gean-G.jpg)
J’ai décidé de limiter mes relations sexuelles à un petit nombre de personnes que je connais bien, sachant qu’elles étaient vigilantes. J’avais très peur de contracter le virus. En deux semaines et demie, je n’ai vu que trois gars. Je couchais fréquemment avec deux d’entre eux. J’ai été me faire dépister pour la mpox et le lendemain, l’un d’eux m’a contacté pour m’annoncer qu’il l’avait contractée. Je m’étais fait tester parce que j’avais remarqué des boutons sur mon pénis. Au début, j’ai pensé qu’il s’agissait de la syphilis parce que j’avais testé positif à la syphilis en avril dernier et les deux boutons logés sur mon pénis étaient situés exactement au même endroit. Après avoir consulté un médecin à la clinique Agora à Montréal, on m’a confirmé qu’il s’agissait bel et bien de la mpox.
Quatre jours plus tard, les boutons ont grossi et me faisaient très mal, j’ai demandé à mon médecin de me prescrire des médicaments. La douleur était tellement intense, j’avais besoin d’une prescription pour m’endormir la nuit. J’ai également pris quelques jours de congé au travail. Je me sentais très anxieux à l’idée de transmettre le virus à mes collègues ou à mes client·e·s. J’étais inquiet de la façon dont la maladie allait se développer. J’éprouvais plusieurs symptômes (boutons, fièvre, frissons, ganglions lymphatiques enflés, mal de tête, douleurs musculaires). Je me suis isolé·e pendant trois à quatre semaines. Je voyais seulement mes ami·e·s à l’extérieur en prenant des mesures de distanciation sociale. Les pires symptômes que j’ai eus se sont présentés lors de la dernière semaine. À mon réveil, après une belle nuit de sommeil, je me suis retrouvé·e avec un paquet de boutons sur les deux mains. C’était très difficile pour moi d’utiliser mes mains ou de tenir des objets sans ressentir de douleur. Les boutons ont disparu au bout de cinq jours, mais je n’ai jamais su ce que c’était. Cela a pris cinq semaines et demie pour que les plaies sur mon pénis guérissent. Encore aujourd’hui, j’ai une cicatrice à l’endroit où ma plus grande plaie était située.
Pendant ma convalescence, le pire c’était que je ne pouvais pas me toucher. Toutes les lésions que j’avais étaient localisées au niveau du pénis et j’étais tellement dégoûté·e que je n’arrivais même pas à le regarder. J’étais vraiment isolé·e et j’ai raté beaucoup d’activités entre ami·e·s – mais de ne pas être capable de me détendre en me branlant, ça c’était vraiment la cerise sur le sundae! Maintenant que je me suis rétabli·e et que je me sens plus à l’aise de montrer mon pénis, je peux recommencer à avoir des relations sexuelles, mais ce n’est pas comme avant la mpox. Je me rends compte que je suis beaucoup plus vigilant·e qu’avant pour ce qui est de ma santé sexuelle. La mpox s’est révélée être la pire maladie que j’ai jamais eue.
Certain·e·s de mes ami·e·s ou des personnes avec qui je pratique le « sexe entre ami·e·s » ont contracté la mpox après moi et j’ai veillé sur iels. J’ai fait de mon mieux pour répondre à leurs questions. Je suis chanceux d’avoir reçu des conseils en abondance de la part de mes ami·e·s médecins. Iels m’ont permis de partager leurs coordonnées avec d’autres qui avaient aussi besoin de conseils.
Grosso modo, je ne suis pas véritablement traumatisé·e par cette expérience. Il me reste toujours une petite cicatrice sur le pénis qui me rappelle que j’ai contracté la mpox, mais ce n’est pas grand-chose étant donné sa taille. Je suis en mesure de vivre avec.
Gean G. a une maîtrise en musique classique et travaille au sein de l’unité de stérilisation de la faculté de médecine dentaire de l’Université de Montréal. Originaire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, iel fait partie de la scène Queer montréalaise depuis 10 ans.